Les Bacchantes | Prélude

30 mars 2012 | Commentaires (0) | Les Bacchantes

Prélude 1 Malcolm – Cadmos et la fondation de ThèbesPOUR NOUS METTRE DANS L’AMBIANCE des Bacchantes d’Euripide, la première chose à faire, c’est de nous rendre en Grèce, la terre de nos célèbres ancêtres les Grecs. Une fois là-bas, il nous faut encore reculer dans le temps. Non seulement de quelques années ou de quelques décennies, ou même de quelques siècles, mais de plusieurs millénaires. Il nous faut reculer jusqu’à cette époque très lointaine, bien différente de la nôtre, marquée par le règne des dieux : une époque où la vie des hommes est tout simplement impensable sans la présence des dieux.

 

Cadmos et la fondation de Thèbes

L’histoire qui nous concerne commence avec un jeune homme du nom de Cadmos. Un jeune homme pas comme les autres en ce qu’il se sent investi d’une mission. Pour la découvrir, il fait ce que tout le monde ferait à sa place : il se rend au sanctuaire de Delphes où siège le plus fameux oracle de toute la Grèce. Voilà ce que ce dernier lui dit : « Une grande tâche t’attend, Cadmos : tu es appelé à fonder une nouvelle cité, la cité de Thèbes. En partant d’ici, tu rencontreras une vache que tu suivras jusqu’à ce qu’elle s’arrête et se couche, morte de fatigue. C’est là que tu bâtiras ta ville ». Comme par hasard, en s’éloignant du sanctuaire, Cadmos tombe sur une vache qui l’étonne par sa majesté et les marques lunaires sur ses flancs. Le jeune homme a tôt fait d’y reconnaître son guide et de se mettre en chemin derrière elle.

Après une longue marche sur les pas de l’animal, Cadmos arrive dans cette région qu’on appelle la Béotie, au Nord-Ouest d’Athènes. Là, tout à coup, exactement comme l’a annoncé l’oracle, la vache s’effondre. Voilà donc Cadmos arrivé au lieu où il doit fonder sa ville. Mais comment faire ? Fonder une cité n’est pas chose aisée. D’autant plus que, mis à part quelques dieux, nul ne s’empresse pour l’aider dans sa tâche. Mais par chance, Cadmos est né sous une bonne étoile : après de nombreux combats et épreuves, il parvient à surmonter toutes les difficultés et à fonder la cité de Thèbes.

Pour récompenser le jeune homme de ses efforts et de ses prouesses et lui assurer une bonne descendance, les dieux lui font l’honneur de lui offrir en mariage la divine Harmonie, fille d’Arès, le dieu de la guerre, et d’Aphrodite, la déesse de l’amour. C’est avec Harmonie, son épouse, et les enfants qu’elle lui donne, que Cadmos coule alors des jours heureux à la tête de la nouvelle cité.

 

Sémélé foudroyée

Prélude 2 Malcolm – Sémélé foudroyéeLe temps passe. Les choses suivent leur cours. De nombreux événements se déroulent, dont un qui va être particulièrement déterminant pour la suite de notre histoire. Un jour, une des filles de Cadmos et d’Harmonie, Sémélé, se fait foudroyer par un éclair, alors même qu’elle est enceinte. Non pas comme ça, par déveine, au détour d’une promenade – à l’époque, les choses ne se passent pas de la sorte –, c’est nul autre que Zeus, le dieu le plus puissant, qui met fin à ses jours. Et ce nulle part ailleurs que dans sa chambre. Pourquoi ? Certains racontent que Sémélé a été poussée à demander à Zeus, avec qui elle entretenait une relation amoureuse, de se montrer dans toute sa splendeur, dans son irrésistible éclat ; d’autres, les mauvaises langues, prétendent que Sémélé a simplement été punie par Zeus pour adultère. Cadmos, lui, croit à la destinée de sa fille. Tellement que pour que personne ne l’oublie il fait bâtir un sanctuaire sur les ruines fumantes de sa chambre.

 

Penthée au pouvoir

Prélude 3 Maclolm – Penthée au pouvoirDe nouveau, le temps passe. Et les choses suivent leur cours. Au point que Cadmos est désormais devenu un vieil homme. Trop vieux pour s’occuper de la cité, il a légué son pouvoir à Penthée, l’un de ses petits-fils.

Lui aussi est un bon roi. Pourtant, contrairement à Cadmos qui, dans ses actions, se fiait aux signes et pouvoirs divins, Penthée s’appuie quant à lui sur ses seules capacités humaines, son intelligence et sa raison, pour faire régner l’ordre et le calme dans la cité. Avec les armes s’il le faut. Pour lui, les dieux ne pèsent pas lourd aux côtés de sa bonne volonté et de ses bonnes actions d’homme. Pas qu’il soit impie : les dieux, il les prie, leur offre des sacrifices et des libations, mais, comparé à son grand-père, le rapport qu’il entretient avec eux est distant, superficiel.

 

Femmes piquées de folie

Prélude 4 Malcolm – Femmes piquées de foliePendant quelques années, l’autorité de Penthée assure à la ville de Thèbes une belle stabilité. Pourtant, tout à coup, les choses basculent. Alors que rien ne le laisse présager, les femmes sont soudain la proie de comportements fort étranges. Elles sont piquées de folie. Elles abandonnent leurs foyers et s’en vont exécuter de mystérieux chants et danses loin de la ville, dans les montagnes avoisinantes. Mais qu’est-ce qui les prend ? Un paysan qui les voit et les entend au loin raconte que dans leur effrayant délire elles invoquent et suivent les faits et gestes d’un dieu oublié, trop longtemps négligé et récemment réapparu en Grèce : Dionysos, fils de Zeus et de la fille foudroyée de Cadmos, Sémélé ; enfant « né de la cuisse de Jupiter », comme on dit, c’est-à-dire de la cuisse de son père Zeus – Jupiter chez les Romains – qui l’a amené à terme après que sa mère a subi l’éclat tant désiré du dieu. Voilà donc que le fils de Zeus, non reconnu par la plupart, revient à Thèbes pour manifester le caractère incontournable de son existence.

Parmi les hommes, il n’y a que deux vieux sages qui croient à la nature divine de Dionysos : évidemment Cadmos lui-même et, avec lui, le devin Tirésias – le plus célèbre de tous les prophètes grecs. Et tous deux croient à tel point au dieu qu’ils n’hésitent pas à s’engager corps et âme pour lui. Bien sûr, comme les deux vieillards, tout le monde est forcé de reconnaître la prodigieuse puissance des événements fauteurs de trouble, mais personne ne les associe à un quelconque devoir manqué vis-à-vis de Dionysos. Penthée lui-même moins que tout autre : sûr de son intelligente raison et de son pouvoir, persuadé d’être sur le bon chemin, il refuse on ne peut plus catégoriquement d’accorder au formidable mystère la place qui lui revient.

Bien au contraire : agacé par les terribles bouleversements dont sa cité est la proie, il entend bien plutôt prendre les armes pour rétablir le bon ordre et ramener les délirantes femmes à la raison et au foyer. Mais, alors qu’il est justement sur le point de le faire, un énigmatique étranger, vêtu à l’orientale, les cheveux longs et les habits amples, se présente aux portes de Thèbes…

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