La beauté est intérieure

Tête d'enfantALORS QUE NOTRE MONDE VOIT TRIOMPHER la beauté extérieure, l’apparence : ce qui compte, pour les gens, c’est de faire bonne figure, de paraître bien, beau, intelligent et riche – quitte à devenir complètement superficiel, vide et faux –, Bboul et Ludo s’interrogent sur l’expression, toujours volontiers utilisée mais souvent juste comme ça, en l’air, qui dit que « la beauté est intérieure ».

*

Beauté intérieure

– Elle m’énerve, ma maman : elle dit toujours des choses que je ne comprends pas.

– Comme quoi par exemple ?

– Par exemple, quand je me regarde dans un miroir, elle me dit que « la beauté est intérieure ».

– Euh… ben forcément, elle n’aime pas quand tu pleurs…

– Très drôle.

– Mais… si tu ne comprends pas, pourquoi alors tu ne lui demandes pas de t’expliquer ce que ça veut dire ?

– Je lui ai demandé, mais je crois qu’elle non plus ne comprend pas très bien ce que ça veut dire. T’en penses quoi, toi ? Ça veut dire quoi « la beauté est intérieure » ?

– Ben moi je pense que ce n’est pas vrai : ce qui est beau c’est ce qu’on voit ; et ce qu’on voit n’est pas du tout intérieur. Ta maman elle dit surement ça comme ça, soit pour te rassurer…, ou alors simplement parce qu’elle l’a elle-même entendu quelque part.

– D’accord, mais si les gens disent ça, c’est que ça doit quand même vouloir dire quelque chose, non ?

– Oh tu sais, les gens ne savent des fois pas bien ce qu’ils disent.

– Oui, peut-être, mais n’empêche que plus j’y pense, plus ça me travaille, plus je me dis que ce ne sont pas que nos yeux qui nous font trouver quelque chose « beau » ou « pas beau ».

– Mais alors qu’est-ce que tu voudrais que ce soit d’autre ?

– Je ne sais pas trop, peut-être tous nos autres sens : oui, nos cinq sens, comme nous apprend la maîtresse à l’école. Attends : la vue, l’ouïe, le toucher, l’odorat, et le goût.

– C’est possible ! Comme on dit d’une musique qu’elle est belle ! Alors même qu’on ne la voit pas du tout !

– Oui ! Tu as tout à fait raison ! Il y aurait donc bien une beauté qui n’est pas extérieure ! Et j’ai même un autre exemple : tu sais, depuis quelque temps, mon papa a décidé, au lieu d’acheter toutes les semaines à maman des fleurs au magasin de fleurs, de les remplacer par des fleurs exactement la même chose, mais en plastique. Il dit que ça coûte beaucoup moins cher et qu’en plus c’est plus pratique.

– Euh… oui, et alors ?

– Eh bien, même que ces fleurs ressemblent beaucoup aux vraies fleurs, moi je trouve que les fleurs en plastiques sont beaucoup moins belles. Elles sont moins belles parce qu’elles ne sentent pas bon comme les autres, et aussi par qu’elles sont toutes dures et toutes froides quand tu les touches. Et moi dès que je sens ça je les trouve tout de suite beaucoup moins belles. Et… à voir la tête de ma maman quand elle les a reçues, elle a l’air tout à fait d’accord avec moi.

– Hum, je comprends mieux : quand ta maman te dit que « la beauté est intérieure », elle veut te faire comprendre qu’il ne faut pas se fier aux apparences et juger les gens sur leur extérieur, beau ou pas, mais qu’il faut regarder – ou… plutôt sentir, justement – ce qu’ils sont à l’intérieur. Et que ce qui compte le plus est justement ça : ce qu’ils sont à l’intérieur !

– Oui ! Quelqu’un de beau ce serait alors quelqu’un qui nous touche, qui nous fait quelque chose, qu’on aime bien et ça, ça peut arriver pour mille et une raisons – et pas seulement des raisons qu’on voit ! Parce qu’on est juste bien avec cette personne ! Parce qu’on aime ce qu’elle dit ! Parce qu’on aime ses gestes, son odeur ! Et aussi parce qu’on peut compter sur elle ; parce qu’elle fait des trucs de dingue, parce qu’elle est drôle, parce qu’elle ne fait pas la gueule pour rien ; ou encore parce qu’elle aime jouer avec les enfants ; parce qu’elle peut même des fois se fâcher très fort ou être très triste et que ça ne la dérange pas de le montrer. Parce que, pour elle, ce qui compte, ce n’est pas seulement d’être bien habillée, d’avoir des beaux habits, d’avoir un beau vélo, d’être toujours gentille et bien coiffée, comme on doit l’être… Alors tu vois, elle n’est peut-être pas si bête, cette expression. Peut-être que la beauté, la vraie beauté, est bel et bien intérieure !

*

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