imagesSaint-Valentin QSamedi, c’était le 14 février, jour de la Saint-Valentin. L’occasion pour moi de pouvoir célébrer et prouver à ma copine tout l’amour que je lui porte. Cependant, l’année passée, nous nous étions alors interrogés sur la signification et l’utilité de cette fête. Peut-être pourriez-vous nous éclairer. Déjà pourquoi devons-nous fêter les amoureux le 14 février ?

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Saint-Valentin RAh, l’amour ! Si je peux me permettre de commencer par quelques commentaires, je dirais d’abord que c’est une grande chance de pouvoir célébrer et prouver son amour. Si possible évidemment pas seulement avec des cœurs en chocolats et des roses rouges. Ensuite que c’est une belle chance aussi de pouvoir partager ses interrogations avec la personne qu’on aime. D’autant plus sur les questions liées à l’amour, justement. Même si ce n’est visiblement pas le cas chaque année pour tout le monde…

La question est donc de savoir quelle est la signification et l’utilité de la Saint-Valentin. Pourquoi doit-on fêter l’amour le 14 février ? Et quel amour, au juste ?

Pour dire la vérité, on ne doit pas la fêter, la Saint-Valentin, même qu’il est vrai qu’il devient de plus en plus difficile de ne pas se faire prendre au jeu ; tant le système nous pousse, chaque année davantage, à participer à la fête.

Participer à la fête, ou plutôt à l’arnaque… Car oui, au fond, la Saint-Valentin est une arnaque ! Comme toutes les fêtes aujourd’hui vidées de leur contenu, qui nous poussent à penser, un jour donné, à quelqu’un ou à quelque chose auquel on devrait normalement penser tous les jours : fête des mères, de Pâques, de Noël, Halloween, et toutes les autres célébrations devenues purement commerciales qui marquent notre calendrier annuel.

La fête des amoureux ? La fête des dupes, oui ! Des esclaves de l’amour calibré, cliché, romantique, symbolisés par les cœurs et les roses rouges, sans même parler du ridicule Cupidon, avec ses petites ailes, son arc mignon et ses jolies petites flèches rouges qu’il décoche …

Fiction d’apparat vide, imposée à nos pauvres petites têtes par une machinerie qui veut faire de nous des êtres moraux, mièvres, dociles, veules, sans caractère. Pseudo-amour qui n’a rien du vrai amour : vous savez, l’amour tragique, plein de mystères, de doutes, de jeu, de jubilations et de souffrances. L’amour passionné, créateur, destructeur, volontiers méchant !

Pour dire la vérité, comme toutes les fêtes de notre époque formidable, la Saint-Valentin est à l’origine une célébration païenne des obscures forces de la terre ; ensuite récupérée par le christianisme, et finalement par le dieu dollar, pour devenir une fête d’esclaves et de dupes.

Reprenons. L’origine de la fête remonte à l’Antiquité, où le milieu du mois de février est associé à l’amour au sens de la fécondité. A Athènes, la période de mi-janvier à mi-février est le mois de Gamélion, consacré au mariage sacré entre Zeus et Héra.

Plus tard, à Rome, se déroulent le 15 février les Lupercales : le festival de Lupercus, dieu de la fécondité, des bergers et des troupeaux. Les Luperques, les prêtres de Lupercus, y sacrifient des animaux bachiques par excellence : un bouc et des chèvres. Ils enduisent ensuite des jeunes patriciens du sang des bêtes sacrifiées ; et les envoie enfin tourner, tout nus, une peau de bête sur les épaules, autour du Palatin. Avec, dans leur main, des lanières de peau de bête, qui leur servent de fouet pour frapper les femmes qu’ils rencontrent et auxquelles ils accordent par là le don de fertilité. Tragique hommage bachique aux sombres puissances terrestres et sexuelles.

Plus tard, au début de notre ère, les chrétiens ont interdit la fête et ont choisi le 14 février – le jour avant – pour en faire la Saint-Valentin, du nom d’un des martyrs Valentin (on ne sait pas trop lequel), qui a souffert et a été sanctifié, c’est-à-dire placé à part, dans l’amour et la gloire éthérée de Dieu.

Ce qu’il faut retenir, c’est que, comme toujours, il s’agit d’une antique histoire éminemment terrestre, sexuelle, tragique – histoire de chèvres, de boucs, de chair, de sang et de fécondité –, qui devient, sous l’influence du christianisme, une histoire éthérée, de toute pureté : histoire qui en appelle à un monde idéal, moral, supraterrestre, dénué de toute pulsion, plaisirs et folie charnels.

Le grand « oui » à la vie tragique est remplacé par le grand « non » à celle-ci, au profit d’une vie calibrée, fade, prétendument idéale, qui fait de nous des êtres mièvres, romantiques : des dupes moralisés, des esclaves d’une immense machinerie catalysée toujours plus fort par une économie toujours plus assoiffée, qui broie toujours davantage les différences et par là bien sûr notre potentiel d’imagination, d’amour, de créativité et de vie.

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Tous les mardis, PHUSIS donne une perspective phusique à une actualité, un événement, un extrait de texte, une pensée, une sensation, un problème ou n’importe quel phénomène jubilatoire ou inquiétant de notre monde formidable. Le matin, à 6h30, un phusicien poste un bref article, sous forme de question à méditer. Puis, au plus tard à midi, PHUSIS propose une réponse et mise en perspective.

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