« NOUS VIVONS UNE ÉPOQUE FORMIDABLE », tel était le leitmotiv de PHUSIS.ch lors de sa mise en ligne en mai 2010. « Pour autant qu’on ait du boulot, et donc un peu d’argent, on peut faire à peu près ce qu’on veut : se divertir, communiquer, s’informer, consommer, sortir, VIVRE, quoi ! Grâce au progrès, presque tout nous devient accessible. Et en plus quasi sans effort ! Et souvent pour pas cher ! C’est génial, nous vivons une époque formidable ! PHUSIS s’adresse à ceux qui sont d’avis que les choses ne tournent pas tout à fait aussi rond qu’on veut bien le dire. »
Voilà les mots (à redécouvrir ici) qui présentaient il y a cinq ans notre site : mots les plus légers, doux et souriants possibles pour transmettre l’étonnement et l’effroi d’un « jeune » philosophe-artiste amené à partager, sur la pointe des pieds, les fruits de ses recherches.
Depuis 2010, évidemment, beaucoup de choses se sont passées, ont changé, évolué dans le monde, en nous, autour de nous, sur notre site ; avec des hauts, des bas, aussi dans nos têtes et dans nos corps. D’aucuns sont même passés par la fenêtre.
Semaine après semaine, nous avons tout fait pour, le plus simplement et joyeusement possible, amener des perspectives, des pistes, des éclairages utiles au sein de notre époque formidable. Les expériences se sont multipliées, les genres d’articles aussi, des textes relativement académiques à la claque de Dionysos en passant par quantité de chroniques, de traductions, de réalimentations, d’essais de tous genres. En cinq ans, plus de… 550 articles ont été postés.
Assez pour passer à autre chose ? Cet été, la question est restée ouverte plus longtemps que les années précédentes. De guerre lasse, aussi. Mais, bonne nouvelle, l’hésitation est derrière : le bétonnage, la désensibilisation sont trop massifs ; trop de pensées, de couleurs, de fantaisies, de nuances sont étouffées dans l’œuf ; il y a trop d’incompréhension, d’indifférence, de tensions mal gérées ; trop d’automatismes néfastes, de surdité, d’œillères, de consensus mous ; trop de gens sont transformés en consommateurs, en touristes, en jouisseurs, en automates, en singes, en idiots, en brutes, et finalement en loques. Tout le monde a beau faire comme si de rien n’était, se vautrer dans ses affaires, le vide perce plus que jamais à travers les planche : la menace gronde partout.
Donc : il faut continuer, reprendre – et s’engager de plus belle. Se plonger dans notre époque formidable pour apprendre à mieux déconstruire ce qui se passe, mieux comprendre et valoriser les faces cachées, oubliées, qui n’ont pas voix au chapitre ; surmonter les catégories, les idées toutes faites, les réflexes fâcheux ; se forger des armes pour trouver, partager et défendre la vie comme elle va et vient. Pour devenir de plus belles, plus fortes et plus dangereuses poches de résistance à la bêtise : à l’objectivation, au désenchantement, et par suite au rétrécissement, au desséchement et aux révoltes qu’impliquent l’idéologie et la technicisation qui s’imposent partout.
La reprise, c’est pour la semaine prochaine, avec des textes plus courts, plus toniques, parfois aussi plus durs – et plus informatifs. Davantage en lien avec l’actualité. Aussi sportive, étant donné que PHUSIS est désormais aussi engagé dans www.ATHLE.ch – site de tout l’athlétisme et toute la course à pied en Suisse romande. Tantôt sur la pointe des pieds, tantôt à coups de marteau. Prochainement aussi sur Facebook. « Pour que vive la phusis – et que ce ne soit pas la catastrophe », pour le dire avec le Dr. Ludovic MietZsche.
Demandez le programme !
- Mardi midi : « Pensée athlétique »
- Vendredi midi : « Décorticage » d’un mot, d’un titre, d’une œuvre, d’une idée, d’un slogan
- Dimanche soir : Suite de la retraduction et réalimentation du Zarathoustra de Nietzsche ou des Bacchantes d’Euripide
Ah, la reprise, enfin !
Comme notre terre nourricière : une fois qu’elle a tout donné, que les récoltes sont faites, que le cycle est bouclé, voici déjà qu’elle repart de plus belle pour un nouveau cycle. La vie, en elle, s’active depuis l’équinoxe d’automne pour augmenter ses forces, dans l’ombre et l’apparente tranquillité. Dans quelques semaines déjà, en une grande éclosion, elles jailliront !
Il semble que PHUSIS muscle le ton à l’aube de sa rentrée automnale…
Je retiens tout particulièrement le mot « loques » (cinquième paragraphe) pour évoquer notre époque. Nous risquons tous de devenir des loques si nous ne redoublons pas d’efforts pour faire les choses juste.
Je suis chaque jour frappé de constater combien le monde que je connais a renoncé à se battre, que ce soit sur le plan individuel ou collectif. Peut-être est-il juste de dire que nous sommes aujourd’hui tous en lutte les uns contre les autres, tout le temps…?
Ce qui est sûr, c’est que l’engagement personnel, fort, dans un projet (de vie, ou même simplement communautaire) pour tenter d’améliorer les choses paraît à l’heure qu’il est très démodé. C’est pourtant encore le meilleur moyen que les humains aient trouvé pour ne pas mourir d’ennui, voire de bêtise, tels des moutons…
D’aucuns s’efforcent de changer les choses, dans l’ombre, notamment les mouvements anarchistes et communistes, qui réalisent un sacré boulot. L’esprit de la Résistance (avec un grand ou petit « r »), peut-être que c’est lui qu’on devrait convoquer quand le ciel s’assombrit?
Espérons que la guerre, qui frappe à nos portes, que les dangers qui nous guettent (à commencer par notre pensée traditionnelle, exsangue) nous fassent sursauter, réagir et… AGIR avec force, conviction et loyauté, individuellement ET collectivement. Pour que ce ne soit pas la catastrophe (pour reprendre une expression phusique)! Il est dingue de penser que nous devons lutter pour limiter les dégâts et sauvegarder l’espoir en nous… L’humain n’apprend-il jamais rien? La vie n’est-elle toujours qu’un éternel recommencement depuis zéro?
A la base, n’y a-t-il pas la joie? Quant à l’amour. n’est-il pas donné? Ou tout ça, devons-nous justement apprendre à le découvrir?
Si nous sommes d’accord pour considérer nos petites existences individuelles comme une gigantesque pièce de théâtre où toutes s’assemblenet, alors nous devons nous poser à mon avis deux questions:
– Quel masque (notre visage) souhaitons-nous montrer dans telle ou telle situation de vie? Il s’agit là de la possibilité que nous avons de cacher certaines choses nous concernant; par là, de conserver une certaine part de mystère. Mystère qu’il s’agit de cultiver à fond… à une époque où nous voulons tout savoir sur tout et tous tout de suite. On pourrait nommer cette dimension-là, de choix, d’option face aux aux possibilités qui s’offrent à nous, notre libre arbitre.
– Quelle identité nous confèrent les différents masques (visages) que nous adoptons tous les jours? Il s’agit de savoir ce que le destin/hasard nous a réservé comme… sort. Pourquoi ne pas croire aux chimères, sorcières et autres dieux? Si nous ne voulons pas que la vie se joue de nous, jouons avec elle du mieux possible, et non contre elle!