Bird PeopleVOUS AVEZ ENVIE DE VOIR UN BON FILM, rafraichissant et libérateur ? Procurez-vous Bird people, le dernier opus de Pascale Ferran (FRA/2014), avec la délicieuse Anaïs Demoustier, et l’excellent Josh Charles ! Il vous donnera des couleurs. Voire même des ailes.
A la surface, dans notre monde, tout est beau, tout est pratique. Humain, très humain, voire trop humain : pragmatique, idéaliste, autrement dit quadrillé, bétonné, air-climatisé. Nous-même y compris. En-dessous, pourtant, il y a toute une vie qui gronde, vie pleine, non seulement claire, mais encore obscure, remplie de mystère, d’innocence, de magie, de fantaisie, de rêve.
Habitués à bien faire les choses – comme on nous l’apprend depuis notre plus jeune âge –, on est amené à oublier de vivre vraiment. Nous voilà prisonniers de mille et une structures, sociales, professionnelles, familiales, morales, qui n’ont somme toute rien à voir avec notre existence profonde. Qui canalisent nos possibilités d’existence, nos désirs, écrasent notre sensibilité, notre ouverture, notre curiosité, notre imagination. Qui font de nous, sinon des machines de guerre, assoiffées d’idéal, de puissance, d’argent et de reconnaissance, des êtres dociles, centrés sur leur petite personne, leurs petites histoires, leurs petites jouissances.
Quoi qu’il en soit, tout le monde s’agite, s’efforce de réaliser au mieux sa tâche, souvent sans se rendre compte qu’il n’est qu’une fonction dans une immense machinerie. Tout le monde joue le jeu, sans même imaginer qu’il est de dupes, qu’il fait de nous des esclaves et des tortionnaires. Bien sûr, de temps en temps, on sent qu’il y a quelque chose qui cloche, mais il faut sauver les apparences. Il faut toujours, à tout prix, sauver les apparences. Alors on continue, et ça continue, toujours et encore. Et même toujours plus, toujours plus vite, toujours plus fort : la roue ne cesse de tourner toujours plus, toujours plus vite, toujours plus fort.
Bird People, c’est une histoire de notre monde. Une histoire de gens, d’oiseaux, voire de gens-oiseaux. Une histoire de gens lourds, prisonniers du système, centrés sur eux-mêmes, à la remorque d’eux-mêmes, égoïstes, volontiers menteurs et manipulateurs. Et une histoire d’oiseaux, légers, curieux, qui sautillent et volettent çà et là , pour mieux picorer et gazouiller. Et nous apprendre à aimer les couleurs, et s’inventer des ailes.
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Au début du film, on vogue entre la surface et ce qu’elle recouvre, entre le visible et le caché, l’ici et l’ailleurs, le dedans et le dehors, le vide et le plein, le « Moi », les autres, le monde. Dans le métro. Vers l’aéroport de Paris/Roissy. Dans un hôtel de luxe. A la fois avec un homme, Gary Newman (Josh Charles), Américain, brillant ingénieur, la grosse trentaine, marié, père de deux enfants, apparemment tout comme il faut, bien dans sa peau. Américain, mais au fond pas si américain que ça… Et à la fois avec une jeune femme, Audrey (Anaïs Demoustier), Française, étudiante à ses heures, femme de chambre dans l’hôtel en question ; charmante, le regard vif, toujours aux aguets. Française, mais au fond pas si française que ça…
L’homme descend dans cet hôtel, juste à côté de l’aéroport. Mais, après une importante séance de travail – aussi pénible que toute importante séance de travail –, voilà qu’il lui arrive ce qui nous pend à tous au nez : le fond caché, le mystère de l’existence se met à gronder, à se révolter, comme jamais. Tout seul, dans sa chambre d’hôtel, Gary passe une nuit épouvantable. Il n’y a rien à faire : c’est l’angoisse. Impossible de dormir, de respirer, de se calmer, de faire bien comme il faut, comme on le lui a appris, comme il le fait à longueur de journée, comme si de rien n’était.
C’en est trop. Il n’en peut plus. Et décide, tout compte fait, tout bien pensé – c’est tout à coup une évidence, la seule possibilité –, de tout plaquer : son travail, sa femme, ses enfants, tout. Pour aller voir ailleurs s’il y est. Pourquoi pas voleter dans les montagnes, dans les Pyrénées, sur les traces de son enfance perdue. Comme seule l’imagination d’Audrey est en mesure de le faire…