Vecteurs de forces surpuissantes

François AugiĂ©rasJour après jour, on a quantitĂ© de choses Ă  faire, Ă  organiser, Ă  rĂ©gler. Toujours pressĂ©, on ne prend pas garde Ă  ce qui se passe vraiment. On est rivĂ© sur nos buts. On se rĂ©fugie dans nos idĂ©es. On n’a guère l’occasion d’être prĂ©sent aux choses. On oublie d’être aux aguets. On manque de tendre l’oreille Ă  ce qui se passe, autour de nous et en nous. Souvent, on ne se rend mĂŞme pas compte qu’on est en vie ; et que la mort est lĂ  aussi. On ne s’ouvre pas aux mille et un mystères de l’existence. On fonctionne comme des automates, comme les machines qu’on utilise – ou qui nous utilisent.

Pour tenir le coup, pour s’en sortir dans notre monde, on est contraint d’être pragmatique, centré sur soi-même, replié sur ses intérêts, concentré sur la réussite de ses petites entreprises. Alors on objective, on manipule, on consomme ce qui nous entoure. Et même ce qui nous constitue. Et on néglige l’ensemble, la multiplicité, les distinctions, les nuances, les couleurs.

Toujours plus, on aime ce qui est clair, stable et constant : efficace, sans ambages, sans ambiguĂŻtĂ©, propre. Dans toute situation, on veut en avoir le cĹ“ur net. On veut savoir ce qu’il en est, oĂą on en est. ConnaĂ®tre le pourquoi du comment. Et comment faire pour que ça marche Ă  tous les coups. Et Ă  moindre coĂ»t.

On ne supporte pas l’équivoque, le doute. On met tout en Ĺ“uvre pour l’empĂŞcher de surgir : on rĂ©sout les problèmes, dĂ©voile ce qui se cache, perce les Ă©nigmes, donne une explication logique Ă  l’inexplicable. Si possible une fois pour toutes. Dès qu’on est confrontĂ© Ă  une situation nouvelle, Ă©trange, mystĂ©rieuse, Ă  un phĂ©nomène ambigu, hors norme, on est inquiet. On le considère comme dangereux. D’emblĂ©e, on cherche Ă  l’éclaircir et le ranger dans nos catĂ©gories de raison. Quitte Ă  le simplifier, le tordre, ou l’écraser, s’il le faut.

*

Logiquement, lorsque quelqu’un Ă©voque des forces inconnues, des puissances qui nous dĂ©passent, dĂ©nuĂ©es d’objectivitĂ©, ça nous est dĂ©sagrĂ©able. On est empruntĂ©, dĂ©muni, ou mĂŞme agacĂ©. On cherche Ă  classer notre interlocuteur dans une sphère qu’on connaĂ®t : parmi les religieux, les mystiques, les poètes, etc. Et le taxe de pas sĂ©rieux, d’azimutĂ©, voire de fou, s’il ne correspond Ă  rien qu’on connaĂ®t.

Toute personne qui se rĂ©clame d’énergies supĂ©rieures, d’une cohĂ©rence qui dĂ©borde notre vision et maĂ®trise rationnelle-morale des choses, est marginalisĂ©e. Ses propos sont considĂ©rĂ©s comme de simples fictions, des Ă©lucubrations dĂ©nuĂ©es de sens et d’intĂ©rĂŞt : son travail comme un simple jeu anecdotique, un divertissement, fait de mĂ©taphores vides, de symboles et autres allĂ©gories stĂ©riles, nĂ©s de sa seule imagination. Bien loin du sĂ©rieux de l’existence, de la claire raison, qui a donnĂ© naissance Ă  la science, Ă  la technique et Ă  mille progrès et avantages sur lesquels on peut dignement s’appuyer !

Et si les forces mystĂ©rieuses, Ă©nigmatiques, qu’expriment et dĂ©voilent certaines gens avaient une rĂ©alitĂ© propre ? Et si, bien que diffĂ©rents de la plupart, ces ĂŞtres pas comme les autres, volontiers dĂ©rangeants, Ă©taient des chercheurs, d’authentiques et honnĂŞtes artistes de la vie ? Et si, en tant que fictions, leurs propos avaient eux aussi une vĂ©ritĂ©, au mĂŞme titre que les paroles des historiens, des scientifiques, des journalistes et autres gens bien comme il faut ? Et mĂŞme plus de rĂ©alitĂ©, de vĂ©ritĂ© que les opinions et pensĂ©es toutes faites qui se rangent aisĂ©ment dans nos catĂ©gories de raison ?

Et si on pariait que ces gens sont des vecteurs des forces surpuissantes dont ils se rĂ©clament ? Que, par leur intermĂ©diaire, la vie elle-mĂŞme cherche Ă  nous faire voir, entendre, sentir quelque chose ? Nous indiquer de nouvelles possibilitĂ©s d’existence ? Corriger nos erreurs ? Nous ouvrir Ă  de nouveaux horizons ?

Ça nous est Ă  tous dĂ©jĂ  arrivĂ© : mĂŞme si on ne sait qu’en faire, mĂŞme si on n’en est pas directement enchantĂ©, on est tous travaillĂ©s, influencĂ©s par mille et une choses qui nous dĂ©passent. Par les mystĂ©rieuses puissances cachĂ©es de la nature, bien sĂ»r, mais aussi par les Ĺ“uvres, naturelles, artistiques, que ces dernières produisent. On a tous un arbre, une fleur, un poème, un livre, un personnage, une musique, un modèle dans la tĂŞte, qui nous guide, nous porte, nous donne un cap, une force, un Ă©quilibre, un calme dans le va-et-vient chahutĂ© du monde.

Et si, de temps en temps, on ralentissait un peu ? S’octroyait une pause, un brin d’instabilitĂ© et de folie ? Et si on s’ouvrait Ă  ces forces qui outrepassent le cadre de notre pensĂ©e ?

1 Comment

  1. Je connais une personne avec des énergies supérieures et comme j’ai la chance de faire du vélo avec elle, c’est super.

    Pour ce qui est de ce pour quoi on se bat, j’ai comme référence la phrase de François:
    LA LOGIQUE Financière TUE L’HOMME ET Détruit LA Planète.

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