EXTRAIT DE L’ACTE III, SCÈNE 1 D’HAMLET DE SHAKESPEARE. D’abord en traduction française, en anglais ensuite, puis dans l’interprétation de Kenneth Branagh dans son film éponyme.
Hamlet incarne l’homme dionysiaque par excellence : s’il n’agit pas, c’est qu’il a plongé son regard dans les tréfonds de la vie, parce qu’il en possède une connaissance vraie, profonde, tragique – et qu’il refuse de se voiler la face. La leçon d’Hamlet est aux antipodes de la sagesse à bon marché de Hans le rêveur qui, en bon moderne, n’agit pas non plus, mais quant à lui parce qu’il est incapable de se décider parmi les trop nombreuses possibilités qui découlent de son excès de réflexion.
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To be, or not to be, that is the question.
Whether ’tis nobler in the mind to suffer
The slings and arrows of outrageous fortune,
Or to take arms against a sea of troubles,
And, by opposing, end them. To die, to sleep,
No more, and by a sleep to say we end
The heartache, and the thousand natural shocks
That flesh is heir to; ’tis a consummation
Devoutly to be wish’d. To die, to sleep,
To sleep, perchance to dream, ay, there’s the rub;
For in that sleep of death what dreams may come
When we have shuffled off this mortal coil,
Must give us pause. There’s the respect
That makes calamity of so long life,
For who would bear the whips and scorns of time,
The oppressor’s wrong, the proud man’s contumely,
The pangs of despis’d love, the law’s delay,
The insolence of office and the spurns
That patient merit of th’unworthy takes,
When he himself might his quietus make
With a bare bodkin? Who would fardels bear,
To grunt and sweat under a weary life,
But that the dread of something after death,
The undiscover’d country from whose bourn
No traveller returns, puzzles the will,
And makes us rather bear those ills we have
Than fly to others that we know not of?
Thus conscience does make cowards of us all,
And thus the native hue of resolution
Is sicklied o’er with the pale cast of thought,
And enterprises of great pitch and moment
With this regard their currents turn awry,
And lose the name of action. Soft you, now,
The fair Ophelia! Nymph, in thy orisons
Be all my sins remember’d.
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Être, ou ne pas être, telle est la question.
Y a-t-il plus de noblesse d’âme à subir
La fronde et les flèches de la fortune outrageante,
Ou bien à s’armer contre une mer de douleurs
Et à l’arrêter par une révolte ? Mourir, dormir,
Rien de plus, et dire que par ce sommeil
Nous mettons fin aux maux du cœur et aux mille tortures naturelles
Qui sont le legs de la chair : c’est là un dénouement
Qu’on doit souhaiter avec ferveur. Mourir, dormir,
Dormir! Peut-être rêver ! Oui, là est l’embarras.
Car quels rêves peuvent nous venir dans ce sommeil de la mort,
Quand nous sommes débarrassés de l’étreinte de cette vie ?
Voilà qui doit nous arrêter. C’est cette réflexion-là
Qui nous vaut la calamité d’une si longue existence.
Qui, en effet, voudrait supporter les flagellations et les dédains du monde,
L’injure de l’oppresseur, l’humiliation de la pauvreté,
Les angoisses de l’amour méprisé, les lenteurs de la loi,
L’insolence du pouvoir, et les rebuffades
Que le mérite résigné reçoit d’hommes indignes,
S’il pouvait en être quitte
Avec un simple poinçon ? Qui voudrait porter ces fardeaux,
Grogner et suer sous une vie accablante,
Si la crainte de quelque chose après la mort,
De cette région inexplorée,
D’où nul voyageur ne revient, ne troublait la volonté,
Et ne nous faisait supporter les maux que nous avons
Par peur de nous lancer dans ceux que nous ne connaissons pas ?
Ainsi la conscience fait de nous tous des lâches ;
Ainsi les couleurs natives de la résolution blêmissent
Sous les pâles reflets de la pensée ;
Ainsi les entreprises les plus énergiques et les plus importantes
Se détournent de leur cours, à cette idée,
et perdent le nom d’action… Doucement, maintenant !
Voici la belle Ophélie… Nymphe, dans tes oraisons
Souviens-toi de tous mes péchés.
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Extrait du film Hamlet de Kenneth Branagh (GBR/USA, 1996) :
Souvenirs, souvenirs… Kenneth Branagh n’est à mon avis pas le meilleur interprète de Hamlet; à choisir, je préférerais David Tennant, plus jeune, plus tragique, en un mot plus dionysiaque.
Romanysos est très érudit, mais je ne suis pas d’accord avec lui: David Tennant est certes jeune, mais plus… romantique (triste fuite vers l’idéal) que dionysiaque, tragique (froide affirmation de la vie telle qu’elle est)…
Le débat est ouvert.
Sans aucune érudition, connaissance du personnage ou de la pièce, je comprend ici que selon Hamlet, nous choisissons de continuer à vivre, d’être, et donc nous acceptons de souffrir, de subir les maux de la chair et du coeur uniquement par peur de ce qu’il y a derrière la mort, de l’inconnu qu’elle réserve. Cette projection, réflexion, nous force à être. N’est-ce pas là une manière de se voiler la face, une fuite du problème que représente la souffrance dans notre société, et non une affirmation du cette dernière? On souffre, mais c’est peut-être pire après, alors restons là et supportons. Etre par peur de ne pas être?
Il ne s’agit pas, avec Hamlet, de la peur de ce qu’il y a derrière la mort. Ni d’ailleurs de la peur de la vie. L’enjeu est la question de savoir comment vivre; comment vivre dans la vie tragique ici et maintenant, marquée par l’injustice et le triomphe des tricheurs. Or la lucidité d’Hamlet le pousse à ne pas agir; ne pas prendre les choses en mains (vengeance de son père) et de simuler la folie – seul remède, selon lui, face à l’absurdité de la vie dominée par les prétendus puissants.
to be or not to be n’est pas une question mais un choix être conscient ou ne pas être conscient.
La conscience mène plus loin.
Prenez une douille d’ampoule et une douille de fusil.
l’une a servie a donné la mort et l’autre la lumière.
La conscience est la voie du dit Saint-Esprit.
Cette voie est la lumière qui peux guider vos pas qui mène la ou vous fixerez les limites de votre conscience.
Le cosmos est infini votre conscience aussi.
Sinon il y a la balle.
Voué ça vie a l’inutile est un choix pas une raison ou alors la raison de l’inconscience.