Tous les mardis, PHUSIS donne une perspective phusique à une actualité, un événement, un extrait de texte, une pensée, une sensation, un problème ou n’importe quel phénomène jubilatoire ou inquiétant de notre monde formidable.
Le matin, de bonne heure, un ami phusicien poste un bref article, sous forme de question à méditer. Puis, à midi, PHUSIS propose sa réponse et mise en perspective.
*
Question – Malaise autour de la tableÇa vous est peut-être déjà arrivé : vous êtes tranquillement assis avec une personne que vous aimez tout particulièrement. Peut-être en train de partager un bon repas, peut-être accompagné d’une bonne bouteille de vin, peut-être même avec un excellent disque dans les oreilles.
Tout à coup, au détour de la conversation, sans que vous ne le vouliez, sans que vous ne sachiez pourquoi, un coincement se fait sentir. Quelque chose ne passe pas. Et, au lieu de ne pas y faire attention, au lieu de respirer un bon coup, avaler tout ça, vous vous fixez sur ce coincement, vous l’écoutez, le cultivez, le laissez grandir. Et ça va de mal en pis. Sans même que vous sachiez pourquoi. Au point que ça prend des proportions toujours plus grandes, et finit par mettre toute la soirée en péril.
Euh… comment faire pour s’en sortir ?
*
Reponse – Malaise autour de la table
Ah, quel régal : une soirée avec quelqu’un qu’on aime ! Une bonne soirée, de partage, de musique, de créativité et de mille et une de ces choses qui font que la vie soit si délicieuse et vaut tellement la peine d’être vécue !
Et voilà qu’il y a tout à coup quelque chose qui cloche, quelque chose qui coince. Et qui se coince toujours plus, toujours plus, toujours plus. Parfois jusqu’à la crise, qui fait qu’on en vienne à se demander si, tout compte fait, la vie est vraiment si délicieuse que ça et vaut vraiment tellement la peine d’être vécue.
Comment faire pour s’en sortir ? Eh bien, dès qu’il y a quelque chose qui nous reste en travers de la gorge, qui coince – que ce soit à cause d’un malentendu, d’une remarque mal placée, d’un ton mal choisi, d’un non-dit, d’une jalousie, d’une gêne, du fait que le monde, la réalité concrète ne corresponde soudain pas à nos idées, à notre volonté abstraite –, eh bien, dès qu’il y a quelque chose qui nous reste en travers de la gorge, qui coince, le mieux est évidemment de le décoincer au plus vite.
Comment ? Ne pas y faire attention n’est sûrement pas la meilleure manière de faire : quand on ferme l’œil sur quelque chose, quand on laisse faire, il y a toutes les chances que le satané quelque chose en question se mette à nous travailler et à nous empêcher de plus belle.
Comment faire, alors ? Respirer un bon coup et avaler tout ça ! Loin de toute fixette et de toute fuite en avant, il s’agit de ralentir : de bien regarder et de bien sentir la situation. Tout en gardant son calme, sa confiance. Non seulement en soi, mais aussi en l’autre, et finalement en le monde entier, qui nous porte et nous permet d’être là, en vie, ensemble avec les gens qu’on aime.
Bref, il s’agit de dire, de partager ce qui s’est passé – ou ce qui ne s’est justement pas passé. Dire, partager et discuter le problème pour mieux le surmonter. Ensemble. En se rappelant que tout ça, au fond, est un jeu, auquel on a de la chance de pouvoir jouer. Et d’autant plus de chance qu’on est, justement, en mesure de pouvoir y jouer avec des gens qu’on aime.
Si on n’est pas entouré d’idiots et de brutes centrées sur elles-mêmes, et si on n’est pas nous-même un idiot ou brute centrée sur elle-même – ce qu’on risque toujours d’être si on ne fait pas attention… –, la discussion permettra non seulement au coincement d’être surmonté, mais encore au partage, à l’amour, au jeu d’être renforcé.
Jeu de la vie qui n’est alors pas un jeu de dupe, de faux-semblants, de cache-cache, de pouvoir et de fierté mal placées, mais le délicieux jeu de la vie, en sa multiplicité et musicalité propre. Un jeu dans lequel il s’agit d’éprouver ses forces et ses faiblesses, de trouver sa place, son ton, son rythme, et les gens qui nous permettent de le faire au mieux : les gens qui, justement, en cas de difficulté, de coincement, de problème, nous aident à les surmonter, à les avaler et à les incorporer.
Pour nous permettre d’apprendre à mieux résonner avec la musique du monde.