PENSÉE ATHLÉTIQUE | A l’heure de l’interview, les athlètes disent à peu près tous la même chose. Dans l’interview du Bund du 5 février 2016, le désormais nonagénaire pionnier du journalisme sportif Karl Erb critique le manque de personnalité des sportifs. En réactionnaire ? En visionnaire ?
Loin de l’originalité d’antan, les sportifs sont aujourd’hui quasi tous les mêmes. Bien sûr, il arrivait, à l’époque, que les sportifs racontent des histoires abracadabrantes, ou bloquent complètement face au micro, comme la skieuse Marie-Theres Nadig, qui se contentait de timides « oui » et « non ». Mais qu’importe : « Ils étaient eux-mêmes. Ils avaient leur originalité, leur personnalité », se rappelle Karl Erb.
« Aujourd’hui, tout est étudié, préparé, calculé. » Pas seulement du côté des sportifs, mais aussi chez les journalistes : « Toujours les mêmes questions, toujours les mêmes réponses, standardisées ». Jamais de véritable échange : « Il n’y a plus de dialogues », c’est l’ennui. Et même plus : « C’est horrible ! », se plaint Karl Erb.
COMMENTAIRE : La mondialisation et marchandisation conduit tout un chacun à agir et à penser de la même manière. Dans les écoles de journalisme, les reporters sont formés à poser les mêmes questions ; dans les centres nationaux de performance, les jeunes pousses sportives à donner les mêmes réponses. Pour faire bonne figure, plaire, aux gens et aux annonceurs et autres sponsors ; quitte à n’exprimer que des banalités.
PERSPECTIVE : Et si les journalistes et les athlètes, loin de toute fadeur, loin de suivre aveuglément les manières courantes de faire, s’arrêtaient un instant pour réfléchir et se demandaient QUI ils veulent être vraiment et COMMENT ils désirent s’inscrire dans le monde ?
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Karl Erb | Un pionnier
Le connaisseur de sport et écrivain est né en 1926 à Belp. Suite à la deuxième guerre mondiale, il compte parmi les premiers journalistes sportifs à faire de leur passion leur profession. Dès 1953, il travaille comme chef de presse et speaker de manifestations sportives nationales et internationales (CM de foot 1954 à Berne, CE d’athlétisme 1954 à Berne, CM de ski 1974 à St-Moritz, etc). Entre 1961 et 1983, il commente le ski, la formule 1, l’athlétisme, l’équitation et le cyclisme à la TV. Il était membre du Comité olympique suisse et actif dans la Commission de sélection du Comité national du sport d’élite. Depuis 1993, Erb (aujourd’hui presque nonagénaire) vit au bord du Lac Majeur, d’où il suit le sport « avec grande attention et beaucoup de passion ».
En sport, mais aussi dans le monde des affaires et en général, existe une expression très utile en lien avec l’article: « la jouer franc jeu ». Comme en France, en 1998, quand les Black-Blancs-Beurs ont gagné la Coupe du Monde. La fête, la joie, le bonheur – court – de vivre un truc de dingue, rien qu’un instant, exprimé avec force…!