Les élections communales helvétiques actuelles font montre de l’immense fadeur du monde politique. Tout, dans ce qui a trait à la cité (la polis grecque), n’y est qu’artifice et jeux de surface : formules, effets, affects, mise en scène.
Les médias ont transformé la politique en théâtre, et les hommes politiques en acteurs, jouant tant bien que mal leur rôle. Chaque politicien prétend certes défendre une position, une ligne, mais ne possède que des croyances, nées d’habitudes, d’opinions, de simples visions du monde. L’ouverture, la hauteur, la profondeur, la tension pour de véritables options de pensée et engagement responsables font défaut. La réalité sociologique, culturelle, intellectuelle, philosophique, scientifique, technique n’est jamais au centre du débat.
La politique actuelle n’a pas davantage d’affinité avec le travail intellectuel qu’avec les progrès scientifiques et techniques. L’avenir de l’humanité n’est jamais en question. Acquérir et assumer des questions de recherche est devenu trop exigeant, trop encombrant, trop problématique. L’homme politique ne pense plus que par formules, en termes de ménagement et d’aménagements : de sa personne, de ses idées, de ses gens, de son territoire. Le but est de bien jouer son rôle : si je suis sympathique et que je connais mes dossiers, c’est assez pour les prochaines élections.
Les médias ont rendu la politique et les politiques tellement fades qu’ils en sont devenu indifférents pour la plupart : pure gestion d’intérêts et d’ambitions, d’abord personnels. Avec pour conséquence que, dans notre univers technicisé, automatisé, la réflexion, l’activité intellectuelle, scientifique, philosophique n’a plus de prise sur la cité.
C’était pareil à l’époque, non?
Non ! La politique n’a pas toujours été de pure surface !
A vrai dire, je ne suis pas d’accord avec ta dernière phrase. A l’Uni de Lausanne, p.ex., de nombreux projets (de recherche, et autre) sont développés par et en collaboration avec les chercheurs et la cité. Dire que la science – surtout elle – n’a pas « de prise sur la cité » me semble un peu gros, quand on vit dans un monde où chaque jour, philo et science, science et cité, finalement politique et activité de recherche s’interpénètrent l’une l’autre, réciproquement, dans un double jeu à hélices.
Tu dis n’importe quoi, mon cher Romanysos: une fois ceci, une fois cela, avec des arguments dénués de cohérence. Exactement ce qu’il faut selon moi se garder de faire, et en politique, et en philosophie !
Absolument pas. Je rappelle simplement que les collaborations entre les hautes écoles (unis, écoles polytechniques), les institutions culturelles (théâtres divers, dont la Grange de Dorigny, à l’UNIL) et bien d’autres endroits et lieux importants, voire capitaux sur un plan politique (donc public) et la politique sont réels. C’est un fait, donc difficile à contredire. Dans le canton de Vaud, c’est l’Etat qui gère l’instruction, jusqu’au tertiaire. Bref, cela pour dire qu’il ne faut trop critiquer la politique et les politiciens, qui font ce qu’ils peuvent (voire doivent). Plutôt que se plaindre du manque d’influence réciproque de la politique sur l’activité intellectuelle, philosophique, scientifique, si l’on s’engageait un peu un plus en politique, pour tenter de changer quelque chose? Pour sûr que ce n’est pas en s’abstenant de voter que nos politiciens sauront ce que des gens comme ceux qui fréquentent PHUSIS pensent! Non?
Je nuancerais mon commentaire en disant simplement qu’effectivement, la politique actuelle est fade et inopérante (voire oppressante, étouffante). Cependant, je crois que si la philosophie, la science, l’activité intellectuelle, culturelle, de recherche, ont un rôle à jouer, il consiste spécialement dans le fait d’adresser un signal (fort) au monde politique. De là à savoir comment s’y prendre… il y a un grand fossé.