On peut distinguer deux justices : l’une d’en haut, des idées claires de l’abstraite raison universelle ; l’autre d’en bas, d’un clair-obscur et mystérieux universel terrestre.
La première est la justice courante, transcendante, telle qu’elle s’impose dans notre tradition. Elle est un principe philosophique qui découle de l’idée d’un monde idéal, qu’il s’agit de faire régner dans le sensible. D’ordre logico-rationnel, elle est faite de règles, de droits et de lois moraux abstraits, appliqués à la réalité concrète. Pour tout événement, c’est elle qui entre en jeu : c’est en sa vertu que sont jugées, sanctionnées ou récompensées les actions humaines.
Centrés que nous sommes sur nos idées, nos droits, nos devoirs, nous avons tendance à oublier et négliger la seconde justice, pourtant pas moins englobante et importante que la première : la justice immanente. La justice de la vie, en sa mystérieuse et claire-obscure cohérence, en son producteur et destructeur va-et-vient permanent. Bien que volontiers oubliée, négligée et écartée, c’est finalement elle qui a le dernier mot : par-delà et en-deçà de la justice idéale, elle tranche entre croissance et déclin, succès et échec, vie et mort.
Et voilà qu’une personne très bien dans son état, tout comme il faut, apparemment de toute justice et de toute justesse, s’en prend soudain plein la figure : est amenée à disparaître beaucoup plus vite que de raison.