De la mort libre
EN REGARDANT VIVRE ET MOURIR LES GENS, on se rend compte que la majorité d’entre eux meurt trop tard, et qu’il n’y a que quelques
Also sprach Zarathustra, connu sous le titre Ainsi parla Zarathoustra, est le livre le plus fameux de Nietzsche. Et le plus difficile. « Un livre pour tous et pour personne », comme l’indique d’emblée le sous-titre. Il s’adresse à tout le monde, mais nul n’y est préparé ; personne n’est prêt à entendre la révolution de pensée et d’action qu’il présente.
C’est un poème philosophique, une étrange homélie morale, non-platonicienne, non-chrétienne. Peut-être le texte le plus obscur et éblouissant de notre tradition, qui se retrouve la tête en bas. Une mine de sagesse tragique, phusique, de libération d’esprit, de grande santé !
PHUSIS a scrupuleusement retraduit le texte, nouvellement intitulé Parole de Zarathoustra, en restant au plus près de l’original.
Chaque article présente un chapitre du livre avec, en bas, notre retraduction littérale et, en haut, sa réalimentation ouverte à partir de nos connaissances et clés de lecture ; réinvestissement qui rend le texte moins dense, moins retors, et par suite plus accessible à nos têtes peu habituées à ce genre d’écrits. La mise en lumière phusique des passages hermétiques rend l’écrit non seulement plus facile d’accès, mais aussi plus stimulant, plus léger et… plus drôle. Le but est qu’il puisse se lire comme un roman, presque de plage…
Les articles peuvent être lus dans n’importe quel ordre. Tout commentaire critique, toute question et proposition d’amélioration est la bienvenue.
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En perse, Zarathoustra signifie « à la lumière brillante », nom avestique de Zoroastre, prophète du zoroastrisme (VIe siècle avant J.-C.). Le Zarathoustra de Nietzsche présente sous maints éclairages la libération des chaînes traditionnelles (platonico-chrétiennes, morales) et le retour à la phusis dionysiaque.
A l’instar de toutes les grandes figures mythiques, Zarathoustra enseigne la sagesse tragique du va-et-vient des phénomènes. Il affirme la vie ici et maintenant, le retour à la terre. D’abord à la foule, dont les oreilles ont tôt fait de s’avérer ne pas être faites pour sa bouche. Puis à quelques âmes solitaires qui, lassées de se baigner dans le fleuve de la tradition, tendent l’oreille vers une autre musique, une autre vérité et expérience de l’existence.
Le livre consiste en quatre parties, divisées en courts chapitres de quelques pages. Nietzsche n’a cessé de souligner la rapidité avec laquelle il a composé son texte : quelques dix jours seulement pour chacune des trois premières parties, qui représentent le Zarathoustra proprement dit (février 1883 à Rapallo, juin 1883 à Sils-Maria, janvier 1884 à Nice). La dernière (supplémentaire) a été écrite entre l’automne 1884 et février 1885.
Pris d’ivresse, de folie créatrice, Nietzsche dit avoir vu naître les diverses parties comme en une explosion : « On n’entend pas, on ne cherche pas ; on prend, on ne pose pas la question de savoir qui donne ; les pensées s’illuminent comme des éclairs, en toute nécessité, dans leur forme, sans hésitation, − je n’ai jamais eu le choix… Tout s’est déroulé de la manière la plus involontaire qui soit, mais comme dans une tempête de sentiment de liberté, d’absolu, de puissance, de divinité… »
Comme les Bacchantes d’Euripide (dont PHUSIS s’est occupé ici), Parole de Zarathoustra a mille et une chose à nous apprendre. Sur le monde, nous-mêmes, la vie qui nous traverse de fond en comble.
EN REGARDANT VIVRE ET MOURIR LES GENS, on se rend compte que la majorité d’entre eux meurt trop tard, et qu’il n’y a que quelques
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