UN JOUR, LORS D’UN DE MES VOLS VERS LE LOINTAIN, j’ai volé trop loin dans l’avenir : un frémissement d’horreur s’est soudain emparé de moi.
Quand, là-bas, au loin, j’ai regardé autour de moi, je n’ai trouvé personne, pas le moindre élément familier. Voici que le temps qui s’écoule était soudain devenu le seul phénomène que je reconnaissais, mon seul contemporain.
Horrifié par ma vision, j’ai alors rebroussé chemin, volé en retour vers chez moi, dans le temps présent – non sans me hâter toujours davantage pour me retrouver au plus vite en terrain connu : c’est ainsi que je suis arrivé vers vous, hommes actuels, et au pays des gens instruits, informés, cultivés : le pays de la culture.
A mon retour, pour la première fois de ma vie, je vous ai regardé d’un bon œil. Au vu des circonstances passées j’étais, une fois n’est pas coutume, rempli de désir pour vous : vraiment, je suis revenu le cœur avide, nostalgique.
Mais que m’est-il arrivé ? J’avais beau être anxieux, avoir peur de voir mon désir déçu et me retrouver là aussi en terres étrangères, mais je n’ai pu me retenir de rire face à ce qui m’est apparu alors ! Jamais mon œil n’a vu quelque chose d’aussi coloré, d’aussi bariolé !
Je n’ai pu m’empêcher de rire, de rire, et de rire encore, alors même que mon pied n’avait pas encore fini de trembler de peur ; tout comme le faisait d’ailleurs également mon cœur : « Mais c’est ici la patrie de tous les pots de peinture ! », me suis-je surpris à dire.
Le visage et les membres coloriés de cinquante touches et taches, voilà comment vous étiez assis là, face à mon étonnement, vous les hommes actuels, vous les hommes du pays de la culture !
Complètement centrés sur vous-mêmes ; entourés de cinquante miroirs dans lesquels vous n’avez de cesse de vous regarder, flattant et diffamant en même temps votre jeu de couleurs, faisant à la fois honneur et honte à votre apparence, à vos faux-semblants, à vos tricheries !
En vérité, vous ne pouviez porter meilleur masque que votre propre visage, vous, hommes actuels ! Qui pourrait vous reconnaître tels que vous êtes, qui pourrait vous démasquer en votre vérité : personne !
Gribouillés que vous êtes, noircis des signes et traces du passé, et ces derniers eux-mêmes recouverts de nouveaux traits, de nouveaux signes, de nouveau faux-semblants, vous êtes bien cachés, bien inaccessibles à tous les interprètes de signes, y compris les meilleurs !
Et vous n’êtes pas moins celés, secrets à celui qui sait sonder les reins : qui, tel que vous êtes, peut même croire que vous avez des reins ! Vous semblez vides, n’être que de pures surface : faits de couleurs et de papiers peints.
Et ce n’est pas tout : votre manière de faire n’est pas sans conséquence. Derrière vos voiles, tous les âges et tous les peuples apparaissent comme vous, colorés, fardés ; par l’intermédiaire de vos faits et gestes, toutes les mœurs et toutes les croyances parlent eux aussi votre langage coloré.
Et quiconque vous enlèverait vos voiles, vos couvre-lits, vos couleurs et autres faits et gestes par lesquels vous vous cachez se retrouverait en face d’un un épouvantail, juste capable d’effrayer les oiseaux.
En vérité, je suis moi-même un oiseau effrayé par l’épouvantail que vous êtes ; quand, le jour où je vous ai vu nu et sans couleur, sans fard, en simple squelette ou carcasse, vous m’avez fait des signes amoureux, je n’ai pu faire autrement que m’envoler, prendre la fuite.
Je préférais encore être journalier, ouvrier aux enfers et parmi les ombres du passé que rester auprès de vous, vous hommes actuels squelettiques fardés de faux-semblant jusqu’au bout des ongles ! Car même les hommes des enfers sont plus gras et plus pleins que vous !
Telle est bien l’amertume de mes entrailles : je ne vous supporte ni nus ni habillés, vous les hommes du pays de la culture !
Tout ce que l’avenir a d’inquiétant et qui a, par le passé, fait peur aux oiseaux égarés est somme toute plus familier et plus rassurant que votre prétendue « réalité ».
Car voilà comment vous parlez : « Nous sommes tout à fait réels, et sans croyance et sans superstition ». Et en parlant ainsi, vous ne pouvez vous empêcher de bomber le torse, de gonfler la poitrine – et tout ça même sans torse, sans poitrines, maigres comme vous êtes au fond !
Oui, comment pourriez vous seulement croire, vous les bariolés, peintures mouvantes, ramassis de tout ce qui a été cru un jour !
Vous êtes des réfutations ambulantes de la foi elle-même, et des briseurs des membres de toutes les pensées. Indignes de foi, voilà comment, moi, je vous appelle, vous les réels, les réalistes !
Vous vous dites lucides : dans vos esprits, tous les temps bavardent les uns avec et contre les autres, dans un immense méli-mélo. Mais les rêves et les bavardages de toute époque étaient encore plus réels que votre prétendue lucidité, votre prétendue nature d’être éveillés !
Vous êtes en fin de compte des êtres stériles : voilà la raison pour laquelle il vous manque la foi. Au contraire de vous, de tout temps l’être créateur a eu ses rêves prophétiques et ses signes stellaires – et il avait ainsi foi en la foi !
Vous êtes des portes à moitié ouvertes sur les choses ; des portes devant lesquelles attendent des fossoyeurs, prêts à entrer pour liquider les sombres affaires. Et telle est bien votre idée, votre réalité : « Tout mérite de périr », voilà votre principe de vie.
Ah, comme vous vous tenez là devant moi, vous les stériles ! Comme vous êtes décharnés, maigres sur les côtes ! Et, sans doute, plus d’un parmi vous n’en est pas dupe, mais l’a reconnu en lui-même.
Et il a dit alors : « Il y a sûrement un dieu qui, alors que je dormais, m’a secrètement dérobé quelque chose… Il n’est pas normal que je sois si maigre, si pauvre, si laid sous mes masques. En vérité, le dieu en question m’a apparemment pris tout ce que j’avais, ma chair, ma richesse, ma beauté ; et ce pour en façonner une petite femme, toute de beauté !
Mon manque de chair, la pauvreté de mes côtes est vraiment étonnante ! » Plus d’un homme de culture a déjà parlé ainsi. Sans trop savoir ce qu’il dit.
Oui, vous êtes pour moi risibles, vous les hommes actuels ! Et vous l’êtes d’ailleurs particulièrement quand vous vous mettez à réfléchir, quand vous vous mettez à vous étonner de vous-mêmes, à ruminer sur vous-mêmes !
Quel ne serait pas mon malheur si je ne pouvais rire de votre étonnement ; et si je me voyais obligé d’ingurgiter la répugnante nourriture qui remplit vos écuelles !
Mais comme j’ai des choses lourdes à porter, je veux prendre tout cette histoire avec vous plus à la légère ; que m’importe que des cafards et des moucherons se posent encore sur mon fardeau !
En vérité, ce ne sont pas eux qui vont alourdir ma charge et ma peine ! Non, ce n’est pas de vous, vous les hommes actuels, les faux-semblants ambulants, les tricheurs, que doit me venir la grande fatigue.
Ah, où donc dois-je encore grimper avec mon avidité, ma nostalgie ? Du haut de toutes les montagnes je cherche des patries et des matries : des terres paternelles et maternelles.
Mais nulle part je n’ai trouvé de pays natal ; dans toutes les villes je suis instable, errant, sans chez moi ; devant toutes les portes je suis un renouveau. Seul contre tous dans le désert.
Les hommes actuels vers lesquels m’a récemment porté mon cœur suite à mon expédition en terres lointaines me sont non seulement étrangers, mais encore une moquerie ; et, parmi eux, je me sens chassé de toutes patries et terres maternelles.
J’en arrive ainsi à la conclusion que je n’aime finalement qu’un seul pays, non encore découvert dans la plus lointaine mer : le pays de mes enfants. C’est pour lui que je hisse mes voiles, leur ordonnant de le chercher et chercher encore, sans trêve.
Par l’intermédiaire de mes enfants, par l’intermédiaire de mes œuvres, je veux réparer, racheter le fait que je sois l’enfant, l’œuvre de mes pères : et par l’intermédiaire de tout avenir, je veux racheter ce présent que vous recouvrez de tous vos innombrables masques de couleurs et autres faux-semblant tricheurs ! Autrement dit : je veux tout faire pour que l’horreur trouvée en volant vers votre avenir ne se réalise jamais !
Parole de Zarathoustra.
***
Traduction littérale
J’ai volé trop loin dans l’avenir : un frémissement d’horreur s’est emparé de moi.
Et quand j’ai regardé autour de moi, regarde : le temps était alors mon seul contemporain.
J’ai alors volé en retour, vers chez moi – et en me dépêchant toujours plus : ainsi je suis arrivé vers vous, vous hommes actuels, et dans le pays de la culture.
Pour la première fois, j’ai amené avec moi un œil pour vous, et un bon désir : vraiment, je suis venu le cœur avide.
Mais que m’est-il arrivé ? J’avais beau avoir peur, – j’ai dû rire ! Jamais mon œil n’a vu quelque chose d’aussi bariolé !
J’ai ri et ri, alors que le pied tremblait encore et en plus le cœur : « Mais c’est ici la patrie de tous les pots de peinture ! » – ai-je dit.
Le visage et les membres peints de cinquante taches : ainsi vous étiez assis face à mon étonnement, vous les actuels !
Entourés de cinquante miroirs, flattant et diffamant votre jeu de couleurs !
En vérité, vous ne pouviez pas porter de meilleur masque que votre propre visage, vous les actuels ! Qui pourrait vous – reconnaître !
Noircis des signes du passé, et ces signes eux aussi recouverts de nouveaux signes : ainsi vous vous êtes bien cachés devant tous les interprètes de signes !
Et si on sait aussi scruter les reins : qui croit donc encore que vous avez des reins ! Vous semblez faits de couleurs et de papiers collés.
Tous les temps et peuples regardent colorés hors de vos voiles ; toutes les mœurs et croyances parlent colorés hors de vos gestes.
Celui qui vous enlèverait vos voiles et couvre-lit et couleurs et gestes : il lui resterait juste assez pour effrayer par là les oiseaux.
En vérité, je suis moi-même l’oiseau effrayé, qui vous a un jour vu nu et sans couleur ; et je me suis envolé quand le squelette me faisait des signes amoureux.
Je préférais encore être journalier aux enfers et auprès des ombres de jadis ! – Car même les hommes des enfers sont plus gras et pleins que vous !
Ceci, oui ceci est l’amertume de mes entrailles, que je ne vous supporte ni nus ni habillés, vous les actuels !
Tout l’étrange de l’avenir, et ce qui a de tout temps fait peur aux oiseaux égarés est en vérité plus familier et rassurant que votre « réalité ».
Car ainsi parlez-vous : « Nous sommes tout à fait réels, et sans croyance et superstition » : ainsi bombez vous la poitrine –ah, et même sans poitrines !
Oui, comment pourriez vous croire, vous les bariolés ! – qui êtes peintures de tout ce qui a été cru un jour !
Vous êtes des réfutations ambulantes de la foi même, et des briseurs de membres de toutes les pensées. Indignes de foi : ainsi je vous appelle, vous les réels !
Tous les temps bavardent les uns contre les autres dans vos esprits : et les rêves et bavardages de tous les temps étaient encore plus réels que votre être éveillé !
Vous êtes des stériles : c’est pourquoi il vous manque la foi. Mais celui qui a dû créer a aussi toujours eu ses rêves prophétiques et ses signes stellaires – et avait foi en la foi ! –
Vous êtes des portes à moitié ouvertes, devant lesquelles attendent des fossoyeurs. Et telle est votre réalité : « Tout vaut de périr. »
Ah, comme vous vous tenez là devant moi, vous les stériles, comme vous êtes maigres sur les côtes ! Et plus d’un parmi vous l’a sans doute reconnu en lui-même.
Et il a dit : « Il y a sûrement un dieu qui, alors que je dormais, m’a secrètement dérobé quelque chose ? En vérité, assez pour s’en façonner une petite femme !
La pauvreté de mes côtes est étonnante ! » Plus d’un actuel a déjà parlé ainsi.
Oui, vous êtes pour moi risibles, vous les actuels ! Et en particulier quand vous vous étonnez de vous-mêmes !
Et malheur à moi si je ne pouvais rire de votre étonnement, et devais boire tout le répugnant de vos écuelles !
Mais comme j’ai des choses lourdes à porter, je veux le prendre plus à la légère avec vous ; et qu’est-ce que cela me fait si des cafards et des moucherons se posent encore sur mon fardeau ?
En vérité, il ne m’en deviendra pas plus lourd pour autant ! Et ce n’est pas de vous, vous les actuels, que doit me venir la grande fatigue. –
Ah, où donc dois-je encore grimper avec mon avidité ? Du haut de toutes les montagnes, je regarde pour des patries et matries.
Mais nulle part je n’ai trouvé de pays natal ; je suis instable dans toutes les villes et un renouveau à toutes les portes.
Les actuels vers lesquels m’a récemment porté mon cœur me sont étrangers et une moquerie ; et je suis chassé des patries et matries.
Ainsi j’aime uniquement encore mon pays d’enfants, non découvert, dans la plus lointaine mer : vers lui j’ordonne à mes voiles de chercher et chercher.
A mes enfants je veux réparer le fait que je sois l’enfant de mes pères : et à tout le futur – ce présent ! –
Parole de Zarathoustra.
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Il s’agit là de la suite de la retraduction commentée et littérale du Zarathoustra de Nietzsche. Quatorzième chapitre de la « Deuxième partie » des « Discours de Zarathoustra ». Les précédents se trouvent ici.
Le discours sur les hommes bariolés et maigres est effrayant, juste et beau à la fois. Sur deux points toutefois, Zarathoustra reste obscur:
Si l’avenir vers lequel il vole n’est pas de l’ordre du mélange de couleurs, comment est-il?
Et comment sera le pays de ses enfants?
Proposition de réponses: l’avenir vers lequel Zarathoustra a volé est sans doute monochrome, mondialisé, type gris béton, loin de toute phusis: l’homme ressemble à une vis, un grain de sable, les phénomènes de la nature ne sont que des objets, utilitaires ou de jouissance. Pour ce qui est du pays des enfants de Zarathoustra, la question reste ouverte: Zarathoustra cherche visiblement à rendre possible d’autres avenirs que celui généré par les hommes de la culture…
Dur oui.
A la fin du texte Zarathoustra semble laisser plusieurs possibilités, mais j’ai de la peine à voir lesquelles. Son voyage dans le futur lui a ouvert les yeux sur l’horreur du présent, mais il est en même temps quand même soulagé de revenir.
Les différentes couleurs ne sont-elles déjà (depuis longtemps)plus que des masques qui couvrent un vide,vide que l’homme ne cherchera bientôt même plus à masquer tant il sera avalé par la mondialisation et la jouissance?
Ou alors reste-t-il quand même dans le monde bariolé assez pour offrir différentes possibilités, aller vers un avenir différent (monde de ses enfants?)?
Est-ce qu’il réalise qu’un processus est en cours ou que tout est déjà déséché?
Si, de retour de l’avenir, déçu de ses contemporains, Zarathoustra hisse les voiles, c’est justement pour voguer vers un autre avenir que celui, fardé, aliéné, au point de devenir désertique, vers lequel s’avance (à vrai dire bien malgré lui) l’homme occidental. Si Zarathoustra change de cap, c’est en vue de corriger le tir, de découvrir une nouvelle terre, celle de ses enfants, de ses oeuvres (philosophico-poétiques, dionysiaques, pour en pas dire… phusiques); terre en même temps gage d’avenir (sain) et rédemption du passé (malade).
Il y va au fond, je crois, toujours du même: de s’arracher de ce qui est malade (les couleurs et masques artificiels, idéalistes – Socrate – qui cherchent à cacher, voire supprimer le vide constitutif de la vie) et cultiver ce qui est sain (qui provient en dernière instance du vide lui-même – Dionysos, la ressource).
Il y a certes un processus en cours, mais c’est celui de l’écrasement de la vie en l’union de ses prétendus contraires en direction du désert; ce que Zarathoustra cherche justement à faire, c’est offrir de nouvelles possibilités d’existences: s’arracher du processus pour laisser la vie tragique se déployer comme il se doit.
Ou est-ce que je me trompe?
Oui c’est ce que je comprend dans le dernier paragraphe.
Dans le reste du texte il n’ouvre aucune possibilité en ce qui concerne ses contemporains, les décrivants comme déjà totalement aliénés et désertiques. La seule chose qui semble les différencier des hommes du futur, c’est que, pour l’instant, ils se donnent encore la peine de se cacher derrière des masques bariolés. Mais ces masques ne sont vraiment que des trompes l’oeil!
« Celui qui vous enlèverait vos voiles et couvre-lit et couleurs et gestes : il lui resterait juste assez pour effrayer par là les oiseaux. »
Le futur lui a permis de voir ce qu’étaient vraiment ses contemporains, et pas seulement ce qu’ils risquaient de devenir.
Ce que je ne comprend pas c’est pourquoi il doit revenir dans le présent, puisque visiblement celui-ci n’a rien de plus et que c’est seul qu’il semble devoir changer de cap…
Le vide non caché du futur serait plus à même de produire quelque chose que celui masqué du présent non?
Est-ce-que l’avenir « monochrome, mondialisé, type gris béton », au lieu des couleurs inutiles, n’est pas une étape de plus vers le vide et donc la ressource?
Bonne nouvelle: tu as de petites oreilles BBoule. Je vais tâcher d’y glisser quelques mots avisés…
Il faut, me semble-t-il, distinguer deux types de vide:
1) La mort définitive, sans ressource, comme résultat de l’idéalisme outré: tout devient artifice, tout devient faux; la vie est assassinée (ce que voit Zarathoustra dans l’avenir, tant côté humain que phusis; et finalement même dans le présent, tant ses contemporains s’avèrent n’être que des squelettes bariolés).
Et 2) Le vide, le retrait, la mort comme ressource du plein, de l’éclosion, de la vie (ce que Zarathoustra voit aujourd’hui dans la phusis non-humaine et veut cultiver sur la terre de ses enfants).
Le Nietzsche de « La naissance de la tragédie » permet peut-être de mieux comprendre ce qui se passe pour nos contemporains (charpentes colorées en route vers l’effroyable avenir): en sur-valorisant Apollon (la surface, la belle forme), on en vient à oublier et écarter, la ressource qu’en est Dionysos. La conséquence en est que, privé de ressource, de vie (Dionysos), Apollon s’enroule sur lui-même tel un cocon et se dessèche en Socrate: pure abstraction faite de schémas logico-rationnels et moraux tout compte fait complètement vides. Or c’est précisément cette pure abstraction, vide de tout contenu, qui guide l’homme occidental, qui façonne son esprit. Bien sûr, Dionysos n’a de cesse de se révolter, et même toujours davantage, pour rétablir l’équilibre, mais Socrate, en contrepartie, n’arrête pas de progresser lui aussi en proportion. Socrate contre Dionysos – Dionysos contre Socrate – Socrate contre Dionysos, etc. Et la roue tourne de plus en plus vite. Telle est bien la situation de notre monde.
A ce stade, deux voies se présentent: 1) l’affirmation du processus socratique qui conduit inexorablement à la mort (sans ressource) de l’homme; 2) le changement de cap et l’effort maximum en direction d’une terre nouvelle, celle des enfants de Zarathoustra… Inutile j’espère, de dire où se situe, envers et contre tout, phusis.ch…